Le nouveau gouvernement de Jean Castex n’incarne pas “le changement écologique auquel aspire le pays”, selon la coprésidente du comité de gouvernance de la Convention citoyenne pour le climat.
ENVIRONNEMENT – Elle ne se sent pas “raccord avec l’équipe et celui qui la dirige”. Laurence Tubiana, pressentie avant le remaniement comme possible ministre de l’Écologie, a “tenu à clarifier” ce samedi 11 juillet dans Le Monde sa volonté de ne pas faire partie de l’équipe gouvernementale, même si elle assure “ne pas avoir eu de contacts” avec l’exécutif sur cette question.
“Je respecte les responsabilités opérationnelles, mais aujourd’hui, je crois davantage aux mobilisations citoyennes pour conduire ce changement qu’à un casting gouvernemental”, explique cette universitaire, figure du combat écologique, ancienne ambassadrice chargée des négociations sur le changement climatique lors de la COP21 à Paris en 2015.
“Le moment est venu de donner des signes d’audace!”
Laurence Tubiana adresse au passage une pique assez sévère au nouveau Premier ministre Jean Castex sur ses intentions en matière d’environnement: “Pour être utile, encore faut-il être raccord avec l’équipe et celui qui la dirige ; ce n’était pas le cas ici”, déclare-t-elle au quotidien.
“Je suis une femme de gauche et écologiste, ce n’est pas un mystère. Jean Castex est sûrement quelqu’un de respectable et compétent, mais il ne m’apparaissait pas incarner ce changement écologique auquel aspire le pays. Or le moment est venu de donner des signes d’audace!”, lance-t-elle, se jugeant de fait “plus utile à l’extérieur” de l’appareil d’État.
“Il y a un gouffre abyssal entre le discours et les actes. C’est cette incohérence, pointée par le Haut Conseil pour le climat que je trouve insupportable”, poursuit celle qui a participé à ce dernier rapport. “Bien sûr, une politique publique se fabrique à l’aide de compromis. Et ce gouvernement va devoir montrer le chemin. Mais il faut revoir tant de choses! On doit changer de modèle économique, or c’est si lent…”, ajoute-t-elle citant les constructeurs automobiles “en train de construire plus d’automobiles, plutôt que de devenir des services de mobilité”.
Elle estime par ailleurs que les résultats des dernières élections municipales dans les grandes villes de France ont “donné un signal”, bien que l’abstention “relève une crise profonde” et qu’elle s’inquiète d’“un risque de coupure avec les territoires péri-urbains”. “Les citoyens mettent désormais l’environnement en tête de leurs priorités, à la même hauteur que l’emploi”, estime-t-elle.
Selon elle, les grandes villes sont des “moyens de pression aussi sur le pouvoir central” et la dernière étude WWF “montre que l’on peut créer un million d’emplois si l’on fait les bons choix. Les projets autoroutiers, par exemple, créent moins d’emplois que la rénovation thermique des bâtiments”, donne-t-elle en exemple.
À voir si le gouvernement Castex et la ministre de l’Ecologie appliqueront et suivront ses conseils venus de l’extérieur. “Les maires écologistes nouvellement élus à la tête de plusieurs métropoles françaises seront ‘des partenaires’ du gouvernement, comme tous les élus qui porteront des politiques vertes, a assuré samedi Barbara Pompili à l’occasion de sa première sortie sur le terrain, en forêt de Fontainebleau. “Sur un sujet aussi important que celui-là, on doit être unis, on doit travailler ensemble”.